Violet comme un chou rouge

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Les couleurs du chou rouge : comprendre la notion de pH avec une expérience scientifique bien colorée, en s’amusant avec (ou sans) les enfants !

Les couleurs ne manquent pas dans parcs et jardins, ou dans les rayons d’un supermarché. La couleur des végétaux dépend de la présence de certains pigments. Caroténoïdes (jaune-orange), anthocyanes (bleu-violet-rouge), flavonoïdes (plusieurs couleurs), et d’autres pigments colorent les les fruits et les fleurs.

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Les feuilles en contiennent aussi, mais les couleurs sont cachées par des pigments verts présents en grande quantité : les chlorophylles. Ces dernières sont impliquées dans le processus qui permet à la plante de produire sucre et oxygène, à partir d’eau et de dioxyde de carbone, en présence de soleil : la photosynthèse chlorophyllienne. La diminution de soleil en automne diminue la production de chlorophylles et fait apparaître les autres pigments. Voilà pourquoi les feuilles en automne sont plutôt jaunes et rouges.

Un certain type de pigment végétal, par exemple la Cyanidine (un anthocyane), peut être responsable à la fois de la couleur rouge d’une rose et de la couleur bleu d’un bleuet. Comment est-ce possible ? La réponse est que la couleur d’une fleur (ou d’un fruit) dépend de la structure moléculaire du pigment qu’elle contient, mais aussi du milieu (acide ou basique) dans lequel le pigment se trouve. Dans le cas des fleurs cités, le pigment se lie avec une substance acide dans la rose et avec une substance alcaline (basique) dans le bleuet. De même, les jardiniers savent très bien que pour obtenir des fleurs bleues sur une hortensia à fleurs rose on rajoute des sels d’aluminium dans le sol, en le rendant plus basique. Ces concepts sont à la base des découvertes du chimiste Richard Willstätter qui lui valurent le prix Nobel en 1915.

Acides et bases expliqués aux enfants

Les enfants comprennent très tôt la notion d’acide, en ayant goûté le vinaigre, le citron, les bonbons acidulés ou d’autres aliments qui « piquent la langue ». Ils ne savent pas le définir, mais il comprennent qu’il s’agit d’une propriété de la matière. Comme d’autres propriétés, même l’acidité a son opposé, la basicité, qui peut avoir les mêmes effets sur notre perception. Par exemple la soude caustique, une base forte, peut causer des brûlures au même titre qu’un acide fort. Si le concept est encore un peu difficile pour un enfant, on peut lui faire l’exemple de comment un objet trop froid et un objet trop chaud peuvent, tous les deux, nous brûler.

Comment les distinguer alors ? Il faut un indicateur, quelque chose qui nous indique si la substance à analyser est acide ou basique. En commerce on trouve le papier de tournesol qui, au contraire de ce qu’on peut penser, n’est pas fabriqué à partir du tournesol mais de certains types de lichens.

Le papier tournesol ne se trouve pas à la papeterie en bas de chez nous, mais dans des magasins spécialisés. Apprenons alors à fabriquer nous-mêmes, à la maison ou en classe, un indicateur avec du matériel facile à trouver : le chou rouge.

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Coyau / Wikimedia Commons, via Wikimedia Commons
Indicateur acide/base avec le chou rouge

Matériel :

  • du chou rouge (ça marche aussi avec les fleurs d’hibiscus ou d’autres fleurs et fruits, mais le chou rouge est le plus économique)
  • du vinaigre, du bicarbonate, du jus de citron, du dentifrice, de la levure chimique, du savon liquide (et plein d’autres substances à tester)
  • une bouilloire, une passoire, des récipients transparents, des ciseaux ou des couteaux

Première étape : couper en morceau les feuilles de chou rouge, les plonger dans l’eau bouillante et filtrer ce « jus ». Attention… ça sent très mauvais et ça tâche la peau et les vêtements ! Une question qui m’ont posée les enfants: pourquoi le chou est rouge (enfin violet) et le jus de chou rouge est bleu ? La réponse est que l’eau du robinet, en contenant des sels dissous,  est légèrement basique.

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Deuxième étape : remplir plusieurs récipients transparents avec le jus de chou rouge. En garder un d’un côté comme témoin. Commencer à expérimenter en testant plusieurs produits et en observant comment change la couleur du liquide. Le résultat le plus spectaculaire s’obtient avec du vinaigre : le liquide vire au rose fuchsia !

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Voilà quelques belles couleurs obtenues.

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On peut même chercher à calculer, de manière approximative, le dégrée d’acidité ou basicité des solutions, sur une échelle, celle du pH (p minuscule, c’est important !), une mesure qui va de 1 à 14.  Ci-dessous une fiche d’activité que j’avais faite pour tester différentes substances.

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Vous pouvez également la télécharger en pdf et utiliser sous licence Creative Commons si vous la trouvez utile (l’échelle ici va seulement de 2 à 11 mais ça suffit largement). C’est une échelle basée sur les couleurs du chou rouge. Les couleurs du papier tournesol sont différentes.

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Pour aller plus loin 

Ce que cache le chou rouge

Jouer avec les colorants alimentaires 

Des mélanges chimiquement intéressants à faire chez vous

Du jus de hibiscus comme indicateur acide-base

Smith C., Ansell D., Les sciences en action, Ed. Chanteclair

5 réflexions sur « Violet comme un chou rouge »

  1. C’est un atelier que j’adore faire avec les enfants et qui a toujours un grand succès ! (Et en plus ils peuvent le prolonger à la maison, c’est parfait.) Je me permet de partager quelques astuces complémentaires aux informations présentes dans ce billet.

    – quand je peux je me déplace avec des tubes à hémolyse et des pipettes pasteur en plastique : ça permet d’ajouter un aspect « utilisation de matériel scientifique » à l’atelier, même si ça marche aussi très bien avec des gobelets en plastique.

    – pour préparer le jus de chou rouge, pas besoin d’eau chaude. S’il est coupé en morceaux de l’ordre du centimètre (voir râpé), ça fonctionne très bien avec de l’eau à température ambiante et ça limite les risques de brûlures.

    – comme produit pour montrer ce que ça donne en basique, j’utilise de la lessive en poudre. Ça a deux avantages : en mélangeant, on la solubilise petit à petit et on peut donc très bien suivre les changements de couleurs… et surtout ça permet d’aller très loin en terme de basicité et d’obtenir du jaune vif ! (On part du bleu/violet pour passer au bleu marine, puis au vert et enfin au jaune fluo, c’est très visuel et ça montre qu’un produit peut être plus ou moins basique.)

    – cet atelier peut permettre de parler du caractère basique du CO2 en solution, à partir d’un soda (comme le coca) et d’eau pétillante dont on compare la couleur dans du jus de chou en temps normal ou en l’ayant fait dégazer (ça permet de conclure que le coca n’est pas acide qu’à cause de ses bulles^^). On peut même aller jusqu’à faire souffler les enfants dans le jus de chou rouge avec une paille : il change progressivement de couleur 😉

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